Le cerisier cassé, vers 1910

Saint Sébastien, par Firmin-Girard, 1859
Auteur : Blanche Roullier (1857-1933)
Le cerisier cassé
Date : Entre 1910 et 1913
Pastel sur papier marouflé sur toile - 113x145 cm
Legs aux Amis des Arts de Charlieu de Blanche Roullier en 1933

Sous ce cerisier, une scène bucolique, un moment joyeux est arrêté comme un instantané où quatre têtes blondes se délectent de cerises. Le printemps est fêté, il fait beau, on entendrait presque les oiseaux chanter, une atmosphère d’insouciance émane de l’œuvre, une ambiance vaporeuse se dégage, renforcée par le pastel.

Le mouvement impressionniste influence grandement ce tableau, par le thème choisi de l’enfance en pleine nature. On retrouve les tons pastel de Berthe Morisot (1841-1895) ; elle fut la première femme impressionniste. Le traitement des visages fait beaucoup penser à Auguste Renoir (1841-1919 ; il représentera toute sa carrière le bonheur de vivre.

Le tableau est peint dans la région de Charlieu, les quatre personnages font partie de l’entourage de Blanche. Elles sont les quatre filles du Docteur Louis Vitaut (1874-1949), fondateur comme Blanche de la Société des Amis des Arts de Charlieu .Nous pouvons les citer dans l’ordre de naissance: Germaine l’aînée, Marcelle, Madeleine, et Elisabeth la cadette.

La lecture du tableau se fait de gauche à droite et selon une diagonale de bas en haut, en partant de la fillette assise à gauche au premier plan (Elisabeth), en passant par toutes les filles successivement pour se finir dans un trou végétal rempli de lumière . Elles se trouvent donc toutes à l’ombre du cerisier et elles sont protégées par lui.
La composition est pyramidale, le sommet en est la main gauche de la troisième jeune fille, l’angle gauche est le pied gauche d’Elisabeth et l’angle droit est le pied gauche de Germaine. 
Le tableau est rythmé par les deux grosses branches et le tronc de l’arbre formant trois diagonales de gauche à droite et contrasté par toutes les branches secondaires qui sont dans le sens inverse comme un quadrillage. Au dernier plan, la masse de l’arbre prend les trois quarts de l’œuvre, il n’y a pas de perspective, ni d’horizon, la ligne de fuite nous emmène au fond à droite dans la lumière.

Les fillettes :
Ce que l’on peut dire, c’est qu’elles sont toutes isolées dans la toile, elles sont habillées en robe d’été mais distinctes les unes des autres. Elles ont toutes une activité et un positionnement différent. Blanche nous montre ainsi leurs différences de caractère.

- Elisabeth :
En robe avec des reflets dans le ton de rose, en manches courtes, ses cheveux sont blonds vénitiens attachés avec des rubans roses, c’est la seule assise par terre, pieds nus, elle tourne le dos de trois-quarts au spectateur, elle ne s’occupe de personne, les cerises sont sur ses jambes et elle va les manger. On peut distinguer chez elle une certaine nonchalance et surtout un esprit d’indépendance.

-Madeleine : 
En robe jaune à manches longues mais retroussées ! Ses cheveux roux sont détachés et reposent sur ses épaules. Elle est debout et fait face au spectateur, c’est la joueuse de la fratrie, elle porte deux paires de cerises en boucles d’oreille; elle esquisse un sourire. Même si elle est jeune, on sent chez elle une grande force de caractère.

-Marcelle : 
En robe bleue à col Claudine et manches courtes, c’est la seule montrant un chapeau de paille au large bord sur sa blondeur avec un ruban assorti à sa tenue. Elle est positionnée debout et de profil, elle est en train de cueillir avec beaucoup d’application et choisit les plus hautes, elle a fait une réserve de fruits dans un pli de sa robe. Elle démontre le caractère d’une jeune fille travailleuse et très organisée.

-Germaine : 
En robe rose à large bretelles, ses cheveux sont longs, ils sont seulement attachés avec un ruban noir qui fait miroir avec sa chaussure. Elle se tient de trois-quarts en face de ses sœurs à l’extrémité droite du tableau, séparée par une branche. On retrouve dans sa situation une position bienveillante de sœur aînée, d’un caractère protecteur  et responsable.

Blanche nous fait vivre un moment familier, traduit avec beaucoup de délicatesse où les enfants sont dans leur « salle de jeux » : les occupations rurales d’un printemps au début du vingtième siècle.